Accueil Critique « Ni juge, ni soumise » de Yves Hinant et Jean Libon

« Ni juge, ni soumise » de Yves Hinant et Jean Libon

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« Ni juge, ni soumise » de Yves Hinant et Jean Libon

Clamons-le haut et fort d’entrée : Ni juge, ni soumise, le documentaire de Yves Hinant et Jean Libon mettant en scène l’atypique juge Anne Gruwez, est un tour de force. Inspiré d’un premier reportage réalisé dans le cadre de l’émission « Striptease », et dont le film est en quelque sorte une suite, Ni juge, ni soumise dresse le portrait décapant d’une femme hors du commun, à la fois juge d’instruction de grande renommée et petit troubadour moderne à elle toute seule.

Si la personnalité d’Anne Gruwez peut déconcerter dans les premières minutes, on s’y attache pourtant rapidement. Car derrière les petits numéros qu’elle enchaine avec une aisance qui pourrait faire pâlir les plus grands clowns, se cache d’abord une femme forte et possédant une maîtrise absolue des situations dans lesquelles elle se trouve. Derrière le comique, il y a donc la grande empathie d’Anne Gruwez. On pourrait penser qu’elle se moque de ses clients, et que le film relaye cette attitude avec froideur, mais c’est tout le contraire : le rire et les postures décalées sont des moyens de créer le contact et de renforcer le lien humain dans un contexte qui ne s’y prête pas.

Dans cette mesure, il n’est pas question d’affirmer que Ni juge, ni soumise se moque des clients qui défilent dans le bureau de notre super juge. Et, plus encore, nous réfutons toutes les accusations de racisme. Le film ne l’est jamais, car il cherche d’abord à créer un dialogue entre deux cultures différentes. Chaque situation présente une rencontre entre OVNIS, à égalité, sans que la juge n’humilie le client. Cet équilibre fragile aurait pu basculer dans certaines scènes, mais c’est avec talent que les deux cinéastes, évidemment bien aidés par l’humanité et la subtile cocasserie d’Anne Gruwez, évitent le naufrage.

Dans Ni juge, ni soumise, le rire est ainsi utilisé comme un connecteur qui permet de rapprocher des gens différents. Par là, le film est typiquement belge. Ne retrouve-t-on pas cela dans le cinéma de Bouli Lanners ou d’Abel et Gordon, pour ne citer qu’eux ? Ni juge, ni soumise, à la fois délirant et rempli de finesse, représente à la perfection ce qu’on appelle la Belgitude et le surréalisme à la belge ! Avec Anne Gruwez, c’est sûr, celui-ci a encore de beaux jours devant lui !

Louons également le succès probable (et mérité) que va rencontrer Ni juge, ni soumise. De moins en moins de documentaires sortent aujourd’hui dans les salles belges. Le film de Yves Hinant et Jean Libon inversera-t-il cette tendance ? Redonnera-t-il aux belges le goût du cinéma documentaire, du moins le goût et l’envie de se déplacer dans les salles pour y découvrir spécifiquement ce type de cinéma ? L’avenir nous le dira, mais espérons que l’horizon du documentaire belge s’éclaircira.

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